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Un genre musical à (re)découvrir : le Rock Fusion par la bibliothèque de Bordeaux Mériadeck

La bibliothèque de Bordeaux est riche d’une importante collection de documents sonores. Désireuse de valoriser les genres musicaux qui la compose, la bibliothèque musicale nous propose une immersion au sein d’une scène musicale qui a connue son apogée dans les années 90 : la fusion. Etat des lieux avec Maxime, notre guide pour l’occasion, à travers 27 albums-phares disponible en prêt au centre musique de la bibliothèque de Bordeaux Mériadeck ou en écoute via notre playlist musicale.

Le terme Fusion est un terme utilisé pour désigner divers styles de fusion de genres musicaux (comme le funk rock ou le rap rock) au sein de la scène musicale rock essentiellement dans les années 1990.

Pourquoi ce choix ?

D’abord parce que c’est un style de musique qui me parle encore et qui a bercé mon adolescence.

Ensuite on peut y voir une tentative d’ouverture d’esprit alors même que nous traversons une époque assez terne et pessimiste. En effet, de par le fait que le rock fusion soit une tentative de mélange des styles cela va à l’encontre des tendances actuelles promptes à rejeter les différences, à opposer voir à cloisonner les styles même en musique. N’est-ce pas le propre du métissage musical que de faire émerger des styles nouveaux ?

Enfin, valoriser les collections qui ne sont peut-être plus actuelles mais qui peuvent parler aux amateurs de différents styles et qui sait, puisque les modes vont et viennent, peut-être remettre au gout du jour un style ou le faire découvrir aux publics.

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Le détail de la sélection :

RUN-DMC : « King of Rock », 1985 (USA, côte est)

Précurseur du hip-hop hardcore, RUN-DMC est sans doute le premier groupe de rap à introduire des riffs de guitare lourdes dans ses compositions. Dans cet album plus aboutit que son prédécesseur on trouve donc Rock the house et King of Rock qui enfoncent la porte pour faire une place à un genre tout neuf et détrôner au passage, de façon ironique, le genre roi jusqu’alors, qui peine à se renouveler dans les années quatre-vingt.

BEASTIE BOYS : « Licensed to ill », 1986 (USA, côte est)

C’est avec Rick Rubin à la production que les b-boys de Brooklyn passent au rap dès leur premier album studio après avoir débuté dans le rock hardcore au toutdébut des années 1980. Empruntant les riffs de ACDC, Led Zeppelin ou encore Black Sabbath pour scander leurs textes, ce disque fait figure d’OVNI à l’époque dans sa tentative de métisser les genres. Il pose les bases de ce que deviendra la fusion quelques années plus tard.

PUBLIC ENEMY : « It takes a nation of millions to hold us back », 1988 (USA, côte est)

Avec Rick Rubin une nouvelle fois à la production, Chuck D et FlavorFlav développent une identité hardcore plus directe que RUN-DMC, moins ironique et plus engagée. En témoignent les riffs de guitare empruntés à Slayer (groupe de trash métal) pour Shewatch Channel Zero ?!ou le titre Bring the noise qui sera repris par Anthrax (autre groupe de trash métal), cimentant ainsi les briques du pont entre rock et rap.

FAITH NO MORE : « The real thing », 1989 (USA, côte ouest)

Premier groupe de hard rock passant le pas après Aerosmith, Faith no more ne se contente pas d’un duo à la WalkthisWay (d’Aerosmith et Run-DMC)mais intègre en son sein un chant plus rap sur le titre Epic. Les débuts peuvent être perçus comme timides certes depuis notre époque. En 1989 pourtant ce titre apparaissait comme très innovant, du jamais vu ! Alors pour l’histoire, replongez-vous dans ce groupe qui a inspiré après lui de nombreux groupes de fusion et de métal.

RED HOT CHILI PEPPERS : « Mother’smilk », 1989 (USA, côte ouest)

John Frusciante (guitariste) et Chad Smith (batteur) sont recrutés juste avant la réalisation de cet album qui fut à l’époque le premier disque d’or du groupe avec 500 000 copies vendues en 1 an. On entend bien ici les influences du funk et du rock puis du rap et du heavymetal, toutes issues des origines musicales des quatre membres du groupe qu’on ne présente plus. Influence majeure de groupes de tous styles, les RHCP ont marqué l’Histoire de la musique d’une empreinte indélébile.

 

FFF Blast culture, 1991 (France, Paris)

Tout est dans le nom du groupe Fédération Française de Fonck. « Fonck » pour l’alliance du funk et de rock, un métissage donc qui orientera le son vers des grooves joviaux communicatifs.

Ce premier album, représentatif d’une époque compte parmi ses membres un certain Yarol Poupaud. Toujours actif, le groupe a sorti son dernier album en novembre 2023.

 

BODY COUNT, 1992 (USA, côte ouest)

Groupe culte mené par Ice-T, qualifié de Rap-métal. Rap hardcore et engagé qui vaudra à Ice-T de multiples polémiques, le groupe toujours actif est à la base de ce son caractéristique des années 1990 à l’image de RATM en moins mélodique. Ce premier album ne fait pas dans la dentelle et adopte un style direct et explicite identifiable par de grosses guitares saturées, une basse lourde et une batterie qui dépote, le tout accompagné d’échantillons d’ambiance (sirène, coups de feu, messages d’annonce à caractère revendicatif). Bref, hardcore.

RAGE AGAINST THE MACHINE 1992 (USA, côte ouest)

Attention album et groupe culte ! Faut-il encore présenter ce groupe qui constitue à lui seul une marche de l’Histoire de la musique? LE groupe de référence, numéro 1 du style fusion (métal-rap-funk-punk). Condensé     de ce qui inspira au-delà des frontières des genres musicaux. Les membres ? Zack de la Rocha, chanteur charismatique, poète et activiste politique au flow limpide, agressif et unique. Tom Morello, tout autant activiste, guitariste novateur par son style et son originalité d’accordage, fan entre autres de Black Sabbath, qui va jusqu’à scratcher sur ses guitares bon-marchées. Tim Commerford (bassiste) et Brad Wilk (batteur) assurant une partie rythmique réglée comme une horloge. Une tuerie !

 

FISHBONE : « Give a monkey a brain and he’ll swear he’s the center of the universe », 1993 (USA, côte ouest)

Ok, le flow rap de Dr MaddVibe, chanteur du groupe n’est pas évident de prime abord mais ce groupe est tellement majeur dans la fusion des styles depuis la fin des années 1970 qu’on ne pouvait pas leur faire l’affront de ne pas les intégrer dans cette sélection. Fishbone sait se renouveler et surprendre tout le temps, marque d’un creuset de grande qualité. Cet album au grooves addictifs vous transportera dans des ambiances funk-métal-ragga-ska-gospel-swing… Inclassable !

 

INFECTIOUS GROOVES : « Groove Family Cyco / Snapped lika Mutha », 1994 (USA, côte ouest)

Troisième album de ce groupe et le plus aboutit si vous êtes séduit par la mélange funk-métal-punk. Energique, un coté comique, peut-être moins perceptible que dans les deux précédents opus mais la production est si léchée que vous succomberez sans doute. Mike Muir au chant (Suicidal Tendencies), Adam Siegel à la guitare (passé aussi par Suicidal Tendencies puis à la basse dans Eels), Brooks Wackerman à la batterie (Bad Religion, Tenacious D), un mélange de styles qui donne un album incontournable et fondateur de la fusion.

URBAN DANCE SQUAD « Persona non grata », 1994 (Pays-bas)

Digne représentant du style fusion en Europe, cet album du groupe néerlandais est celui qui le popularisa à l’échelle internationale. Prenant une direction plus rock que ses prédécesseurs conjugué au flow incisif de Rudeboy Remmington, reconnaissable entre tous, fait de cet album l’équivalent en qualité et en énergie du premier album de Rage Against The Machine auquel Urban Dance Squad est souvent comparé.

 

H-BLOCKX : « Time to move », 1994 (Allemagne)

Seul album du groupe aux influences fusion rock-funk-rap, ce groupe a pu convaincre à l’époque mais n’a malheureusement pas conservé cette ligne dans ces opus postérieurs, surfant sur les modes et n’étant pas parvenu à se renouveler. Time to move reste cependant représentatif de cette époque et traduit tout de           même bien l’énergie et l’esprit fusion étant donné ses compositions rythmées et abordables de tout curieux de découvrir le style.

 

NO ONE IS INNOCENT 1994 (France, Paris)

Représentant phare du style fusion dans l’hexagone, ce premier album marque d’une pierre blanche l’entrée en scène d’un groupe engagé-enragé qui n’a pas dévié sa trajectoire depuis cet acte fondateur. Inspiré de Rage Against The Machine avec une identité propre, guitares puissantes et chant qui percute les tympans, textes inspirés, album et groupe à (re)découvrir.

 

SILMARILS 1995 (France, Lisses)

Groupe français né au tout début des années 1990, c’est avec « Cours vite » qu’il atteint une certaine notoriété. Plus récemment, dans les années 2010 avec Va y avoir du sport. Toujours actif à l’heure actuel, nous vous proposons ici leur premier album aux accents plus rock-rap-funk qui les fit connaitre et sortir de l’anonymat.

 

ONEYED JACK : « Cynique »,1995 (France, Paris)

Un bon flow au micro, une basse slappée bien présente, une guitare parfois lourde et du scratch très présent, voici les ingrédients de Oneyed Jack, groupe français représentant du métissage à l’œuvre alors dans les années 1990.

 

SKUNK ANANSIE : « Paranoid & Sunburnt », 1995 (Angleterre)

Les filles se mettent aussi à la fusion à l’image de Skin, chanteuse déjantée du groupe qui prouve par sa présence vocale que rien n’est à envier aux garçons. Coté style, le funk prédomine mais il est survitaminé et s’allie parfaitement aux influences plus rock, voire rock plus lourd tout cela sublimé par la voix inqualifiable coté style, de Skin.

 

SEPULTURA : « The roots of Sepultura », 1996 (Brésil)

Ce disque peut paraitre moins fusion que d’autres du fait de l’aspect moins rapé des paroles. Il est néanmoins fusion dans ses constructions rythmiques et le métissage des genres. Il intègre aussi des codes du rap comme l’utilisation de scratch sur « Look away » notamment. Ce disque est brut, sauvage et du fait des références à la culture brésilienne, identitaire. Sepultura, avec cet album peut être considéré comme le Rage Against The Machine sud-américain, mais un Rage à nu  et peut être encore plus radical.

 

SNOT 1997 (USA, côte ouest)

Depuis Roots de Sepultura, s’est amorcé un virage métal dans la fusion. Pour « Snot », le virage n’est pas trash mais un peu métal dans la voix parfois. Cette voix puissante de Lynn Strait qui s’est éteinte à jamais dans un accident de voiture peu après la sortie de cet album n’est pas la seule chose remarquable de ce groupe. En effet, une batterie très en nuance, à la caisse claire bien tendue, aux tons funky et parfois planants (dans les variations de « Get some ») est aussi remarquable. Teinté de punk, de métal, de funk, d’univers rap, ce disque est aussi à considérer comme un classique.

 

INCUBUSS.C.I.E.N.C.E, 1997 (USA, côte ouest)

Que dire de ce groupe qui poussa jusqu’en 2000 les expérimentations et les mélanges de styles à un niveau alors jamais égalé dans ce qu’on rangeait dans le rock ? Dans cet album vous retrouverez un groove qui ferait danser les morts, une unité de groupe qui se ressent physiquement, un chant rapé ou plus sensuel, agrémenté de riffs de guitare implacables subtils mais lourds tout cela soutenu par des rythmes qui du premier au dernier morceau font de S.C.I.E.N.C.E un album incontournable du style fusion.

KID ROCK : « Devil without a cause », 1998 (USA, Michigan)

Kid Rock s’approprie la fusion dans son style avec son flow parfaitement addictif. On sent l’équilibre entre les styles rap, hard rock, blues ou country. Un produit typiquement américain moins vindicatif mais quand même pertinent qui popularise le genre à l’international.

 

PLEYMO (keçkispasse), 1999 (France, Fontainebleau)

Dans la mouvance de la fin des années 1990, Pleymo est parmi les groupes français qui ont connu un succès assez fulgurant, notamment dû à leurs prestations scéniques. Le groupe développe une fusion rap-métal avec un chant presqu’épileptique et un univers personnel marqué par une appropriation de la langue française unique en son genre. L’intégration de samples et de platine de mix fait aussi le style du groupe qui se dirige par la suite vers une typicité plus métal.

LIMPBIZKIT : Significantother », 1999 (USA, Floride)

La pochette de l’album est assez évocatrice pour ce groupe de rap-métal qui donne lui aussi un coup de pied dans la porte pour se faire une place dans le milieu de la fusion et y prendre sa place en jouant des coudes. Marqué par des influences d’autres groupes du moment parmi lesquels Korn, Deftones ou System of a down, le groupe puise aussi son inspiration auprès de personnalités du rap parmi lesquels Method man, Snoop Dog ou Eminem. Un mélange explicite et explosif.

 

RAGE AGAINST THE MACHINE The battle of Los Angeles, 1999 (USA, côte ouest)

Troisième et avant dernier album studio du groupe, encore un must have pour l’énergie générale déployée, la virtuosité de Tom Morello, les textes incendiaires de Zack de La Rocha et le groove de la partie rythmique. Un groupe de légende dont l’identité sonore souvent imitée n’a jamais trouvé de concurrent valable.

 

POD Satellite, 2001 (USA, côte ouest)

Formé en 1992, leur premier album sort en 1994. L’album « Satellite » est parmi le plus aboutit et le plus populaire de « Payable On Death ». Dans les bacs le jour même des attentats des Twin Towers, son message positif a pu contribuer, autant que son énergie, à son succès. Dans la veine, au niveau du style, de RATM, les idéaux mis en avant sont cependant à l’opposé pour POD qui représente encore aujourd’hui le courant du White metal.

CYPRESS HILL : « Stoned Raiders », 2001 (USA, côte ouest)

Cet album confirme l’orientation prise par Cypress Hill en 2000 avec « Skull & Bones » vers le métissage de son rap hardcore avec le rock. Cette fois la fusion est opérée et les titres accentués par des guitares lourdes et saturées peuvent surprendre les fans du groupe. Le style sombre s’en trouve aussi renforcé mais ne perd rien de son identité toujours garantie par le timbre et le phrasé si caractéristique de B-real au micro que vient ponctué les interventions de son acolyte Sen Dog.

 

PROPHETS OF RAGE 2007 (USA, côte ouest-cote est)

La boucle est bouclée avec ce super groupe qui en plus de mélanger les styles, mélange aussi les membres pour faire naître la crème de la crème. Si vous êtes familiarisés avec le style fusion vous devez comprendre : Tom Morello à la guitare, Tim Commerford à la basse, Brad Wilk à la batterie (tous ex RATM), Chuck D au micro (ex Public Enemy) qui le passe à B-Real (leader de Cypress Hill) et DJ Lord aux platines (ex Public Enemy), rien que ça !! Un casting prometteur qui remplit le contrat.

 

LINKIN PARK [Hybridtheory], 2001 (USA, côte ouest)

Les codes de la fusion y sont avec une touche electro prononcée en plus et un chant équilibré entre rap, dialogue et lyrisme. Avec cet album, Chester Bennington auteur et chanteur, exorcise ses démons, accompagné d’une batterie qui booste, et de guitares saturées aux riffs accrocheurs. « In the end », titre culte a la particularité de ces chansons qui investissent votre cerveau pour un temps indéterminé. L’ambiance assez mélancolique de cet album plus rock que métal a su conquérir des millions de fans.

 

RAGE AGAINST THE MACHINE, 2001 (USA, côte ouest)

Un DVD représentatif de l’énergie déployée sur scène et dans quelques clips. Document datant de 2000, il est une mise en bouche pour qui voudra aller plus loin et découvrir le travail du groupe post 2000. Coincé dans le carcan du star system malgré une posture anti system, le groupe assume totalement son succès en véritable fédérateur politique d’opposition et porteur de voix contre les injustices et les laissés pour compte.

 

Pour aller plus loin dans l’exploration :

« Rock fusion » : Funk, hip-hop, nü-metal & autres métissages de Jean-Charles Desgroux (Le Mot et le Reste) (2021)